Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lundi, 28 mai 2012

Une bonne nature

« Nous laissons aux physiologistes à expliquer ce phénomène : mais en voyant qu'il avait tué sa femme, il fut saisi d'un accès de rire inextinguible, qui durait encore au moment où sa belle-mère vint frapper à la porte de la chambre, pour savoir comment les époux avaient passé sa nuit.
Son effroyable gaieté redoubla lorsqu'il entendit la voix de la mère de la défunte. Courant lui ouvrir, il la saisit par le bras ; et, la traînant en face du lit pour qu'elle contemplât bien ce beau spectacle, il fut atteint d'un redoublement de rire qui ne se calma que quand il vint à haleter sous un hoquet furieux. »

 

Le ministère public par Charles Rabou

dimanche, 27 mai 2012

De la couleur des peaux

Le fait est certain : nous n'avons plus à chercher que le comment. D'abord, il est à présumer que toutes les parties du globe ne furent pas couvertes par les eaux, & qu'un des pôles, ou tous deux restèrent à sec, par un effet de la rapidité du mouvement de la terre sur elle-même : ce n'est pas assez dire, qu'il est à présumer : le fait est certain : mais les êtres qui étaient aux pôles, étaient mesquins, frêles, comparés à ceux des régions de l’Équateur. Ce furent néanmoins ces êtres qui repeuplèrent tout le globe, tant en plantes qu'en animaux. Les petits hommes de la zone glacée, s'étendirent, & vinrent habiter les régions brûlantes de la zone torride. & s'y habituèrent : ceux qui étaient déjà noirs par le frois, le devinrent encore davantage par la chaleur; ceux qui étaient moins près du pôle, & qui avaient également échappé, demeurèrent blancs.

Restif de la Bretonne
Les Nuits de Paris

Virgil_Solis_-_Deluge-1.jpg

Le Déluge

Gravure de Virgil Solis pour les Métamorphoses d'Ovide,
livre I, 253-312. Folio 5v, image 9.

J'ai vu de pauvres poules...

" À Sesto Calende, j'ai vu de pauvres poules si souvent cochées par des coqs trop nombreux qu'elles avaient le dos entièrement déplumé, le croupion à vif, et allaient se mettre d'elles-mêmes à la broche, pour échapper à ce martyre. Car, ô Présidente, si tu étais seulement grimpée vingt-deux fois par minute, et cela depuis trois heures du matin jusqu'à huit heures du soir, peut-être trouverais tu que c'est de trop. Il est vrai que les femmes n'ont pas là-dessus les mêmes idées que les poules; celles-ci portaient d'ailleurs une seule plume au cul, pour la commodité des jeunes gitons d'auberge, qui, lorsqu'ils voient une calèche anglaise, vont la leur arracher et la trempent dans la petite bouteille d'huile attendant l'événement. "

Lettre à la Présidente
Théophile Gautier


 

Perpendiculairement

23 juin 1940

(...) Sur la place de la mairie, le garde-champêtre de Concarneau a tambouriné un aviss devant l’immeuble où réside l’Orst-Kommandantur.

 «  C’est très sérieux » déclare-t-il en clignant de l’œil vers nous. Puis il ânonne péniblement : « Les piétons devront marcher sur les trottoirs et ne devront traverser les rues que perpi… per… perdiculairement. Interdiction de stationner, interdiction de se rassembler. »

 Les Bretons rigolaient ouvertement sous l’œil stupéfait de quelques officiers allemands, habitués au respect absolu du règlement. 

 « Ça vous fait rire, hein ? conclut le garde champêtre. Et, en même temps, on a envie de pleurer », a-t-il ajouté d’une voix chevrotante.


Benoîte et Flora Groult
Journal à quatre mains

samedi, 26 mai 2012

Spectacle de marionnettes

" Le soir, on nous a donné un spectacle de marionnettes; l'homme et la femme, très jeunes tous les deux et récemment mariés, prêtaient leur voix aux petits personnages. La femme, armée d'un clitoris qui faisait relever sa jupe comme un bout d'épée ou une pine en érection, avait un organe trombonant, un contralto poilu, genre Crapobiska, dans le goût d'Ernesta, et le mari une voix flûtée, genre Abeilard, après l'opération; ce qui ne l'empêchait pas de foutre et de branler sa femme pendant les monologues des héros en butte aux rigueurs du sort et de l'amour; divertissement qui faisait trembler la toile, marquer les genoux de la femme au milieu de la décoration et traîner les jambes des marionnettes aux moments de pâmoison. "

Lettre à la Présidente
Théophile Gautier


Midi : à table !

« Or la prédiction du jongleur avait tellement condensé les idées assez peu fluides de l’apprenti drapier, qu’il était demeuré tout étourdi au centre de la demi-lune, et n’entendait point les voix argentines qui babillaient dans les campaniles de la Samaritaine, et répétaient midi, midi ! ... Mais, à Paris, midi sonne pendant une heure, et l’horloge du Louvre prit bientôt la parole avec plus de solennité, puis celle des Grands-Augustins, puis celle du Châtelet ; si bien qu’Eustache, effrayé de se voir si fort en retard, se prit à courir de toutes ses forces et, en quelques minutes, eut mis derrière lui les rues de la Monnaie, du Borrel et Tirechappe (...)"

Gérard de Nerval
La Main enchantée
VI -Croix et misères

 dc267bb0caa9b65bc0c5ca01348f9bcf2199a534_m.gif

http://lovegifs.net/


09:10 Publié dans / Nerval | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 25 mai 2012

Clystère d'excuses

" Tout ceci étant déduit, je crois qu'il est l'heure de tirer la toile, et, suivant l'usage de nos anciennes comédies, de donner un coup de pied par derrière à mons le Prologue, qui devient outrageusement prolixe, au point que les chandelles ont été déjà trois fois mouchées depuis son exorde. Qu'il se hâte donc de terminer, comme Bruscambille, en conjurant les spectateurs « de nettoyer les imperfections de son dire avec les époussettes de leur humanité, et de recevoir un clystère d'excuses aux intestins de leur impatience » ; et voilà qui est dit, et l'action va commencer. "

 Gérard de Nerval
La Main Enchantée (Histoire macaronique)
III -Les grègues du magistrat

09-569241.jpg

Caricature  - Musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée


 > Quelques pensées sur le clystère : Divagazioni sul clistere e sul suo inventore, in Minerva medica, 1933, Revue d'histoire de la pharmacie, 1934, vol. 22, n° 85, pp. 262-263. Revue Persée