mardi, 21 août 2012
Main de gloire
Disant cela, le bohémien tira de sa poche son livre d’Albert le Grand, et, à la clarté de la lanterne qu’il avait apportée, il lut le paragraphe qui suit : Moyen héroïque dont se servent les scélérats pour s’introduire dans les maisons. « On prend la main coupée d’un pendu, qu’il faut lui avoir achetée avant la mort, on la plonge, en ayant soin de la tenir presque fermée, dans un vase de cuivre contenant du zimac et du salpêtre, avec de la graisse de spondillis. On expose le vase à un feu clair de fougère et de verveine, de sorte que la main s’y trouve, au bout d’un quart d’heure, parfaitement desséchée et propre à se conserver longtemps. Puis, ayant composé une chandelle avec de la graisse de veau marin et du sésame de Laponie, on se sert de la main comme d’un martinet pour y tenir cette chandelle allumée ; et, par tous les lieux où l’on va, la portant devant soi, les barres tombent, les serrures s’ouvrent, et toutes les personnes que l’on rencontre demeurent immobiles. « Cette main ainsi préparée reçoit le nom de main de gloire. »
― Quelle belle invention ! s’écria Eustache Bouteroue.
Gérard de Nerval
La Main enchantée
10:11 Publié dans / Nerval | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nerval, la main enchantée, albert le grand, sorcellerie
samedi, 26 mai 2012
Midi : à table !
« Or la prédiction du jongleur avait tellement condensé les idées assez peu fluides de l’apprenti drapier, qu’il était demeuré tout étourdi au centre de la demi-lune, et n’entendait point les voix argentines qui babillaient dans les campaniles de la Samaritaine, et répétaient midi, midi ! ... Mais, à Paris, midi sonne pendant une heure, et l’horloge du Louvre prit bientôt la parole avec plus de solennité, puis celle des Grands-Augustins, puis celle du Châtelet ; si bien qu’Eustache, effrayé de se voir si fort en retard, se prit à courir de toutes ses forces et, en quelques minutes, eut mis derrière lui les rues de la Monnaie, du Borrel et Tirechappe (...)"
Gérard de Nerval
La Main enchantée
VI -Croix et misères
09:10 Publié dans / Nerval | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 25 mai 2012
Clystère d'excuses
" Tout ceci étant déduit, je crois qu'il est l'heure de tirer la toile, et, suivant l'usage de nos anciennes comédies, de donner un coup de pied par derrière à mons le Prologue, qui devient outrageusement prolixe, au point que les chandelles ont été déjà trois fois mouchées depuis son exorde. Qu'il se hâte donc de terminer, comme Bruscambille, en conjurant les spectateurs « de nettoyer les imperfections de son dire avec les époussettes de leur humanité, et de recevoir un clystère d'excuses aux intestins de leur impatience » ; et voilà qui est dit, et l'action va commencer. "
Gérard de Nerval
La Main Enchantée (Histoire macaronique)
III -Les grègues du magistrat
Caricature - Musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée
> Quelques pensées sur le clystère : Divagazioni sul clistere e sul suo inventore, in Minerva medica, 1933, Revue d'histoire de la pharmacie, 1934, vol. 22, n° 85, pp. 262-263. Revue Persée
09:51 Publié dans / Nerval | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gérard de nerval, clystère, politesse, la main enchantée, histoire macaronique, les grègues du magistrat